L'Occident est-il un exemple universel ?
Chronique politique du vendredi matin des Matins Luxe sur Luxeradio
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Au-delà du bras de fer Moscou/Washington, au prétexte de la crise ukrainienne, s’expriment non seulement un désaccord profond de géopolitique et une évidente lutte d’influence, mais plus profondément et bien plus grave, une lutte sans merci entre deux conceptions de la société. S’ajoutera à cette problématique, plus tôt qu’on ne le croit, la conception de cet énorme monstre qui s’est réveillé à l’économie de marché : la Chine. L’implosion de l’URSS, précédé de la chute du mur de Berlin, avait offert au Monde médusé, une occasion historique d’une réconciliation autour du respect des uns des autres, avec en toile de fond, les droits de l’Homme. La Russie, débarrassée des utopies communistes, se lançait dans une remise en question de sa pensée économique, pour se rallier in fine au capitalisme libéral. Mais voilà, l’Amérique considérait qu’elle avait gagné la guerre et que la Russie devait être traité comme une Nation battue.
En vérité l’Occident triomphant a voulu, à marches forcées, imposer la démocratie et la modernité,
sa démocratie et sa modernité, au reste du monde. C’est là une dissension bien plus profonde que la lutte pour le respect des frontières, qui sont par essence, fluctuantes. La démocratie occidentale est un lieu culturel, mais il n’est pas le seul. A vouloir l’imposer sans tenir compte des autres formes de société, revient à déployer une réelle hégémonie, soutenue par des sanctions diverses et variées, et l’histoire récente nous l’a démontré, parfois par les armes. Il y a certes l’Occident avec sa culture que personne ne conteste, mais il y a aussi la Chine et sa région, l’islam fondamentaliste et la Russie orthodoxe.
Par l’avancée de l’Union européenne vers la frontière de cette Russie qui refuse de faire siennes certaines règles du monde occidental, par l’Otan dans les bagages de cette Union, on reproche au Président russe, Vladimir Poutine, son refus de l’évolution des mentalités, à l’horloge occidentale. Le peuple russe, les Slaves, ont des règles de vie ensemble, une conception de l’exercice de l’autorité, qu’ils ne sont pas prêts d’abandonner sur l’autel de la modernité occidentale. Ces peuples se retrouvent plus dans un Vladimir Poutine que dans un François Hollande ou Barak Obama
Pour les Russes, comme pour le monde islamique ou encore la Chine, l’Occident n’est pas un exemple à suivre, il est décadent. Ils ne veulent pas remplacer le Héros par le commerçant et de ce fait combattent tout à la fois le matérialisme, le libéralisme, le pacifisme et le catholicisme. Il faut que l’Occident voit midi ailleurs. A vouloir donner des leçons, l’Occident se décrédibilise, Il traine trop de casseroles pour le faire. Doit-on citer : le Kosovo, l’Irak, l’Afghanistan, le Panama, l’ile de Grenade et plus près de nous, le Mali, la Côte d’Ivoire, la Libye, la Centrafrique, sans oublier toutes les interventions, directes ou indirectes, de Washington en Amérique du Sud.
En géopolitique il n’y a ni justice ni vérité, tout se confond, se transforme au gré des circonstances. La modernité émancipatrice a des concurrents redoutables, les autres hauts lieux de civilisation. On peut, en le simplifiant, résumer la situation à un combat entre modernité et tradition. Chacun sait que les traditions ont la vie dures, car elle sont l’ossature de beaucoup de sociétés restées humaines. L’Occident se croit parfait et enviable. Cette autosatisfaction frise l’aveuglement. Amener le monde islamique, la Chine traditionaliste et la Russie orthodoxe, par exemple, à respecter les homosexuels, avec dans la foulée l’indifférenciation sexuelle, la fin de la complémentarité homme-femme, la cellule familiale ramenée à sa plus simple expression, est utopique, plus, une injure aux autres formes de société qui préféreront rester dans l’homophobie. Aux islamistes, on pourra plaider l’émancipation de la femme, enfin adulte, mais si c’est au prix de la glorification de l’adultère, ils diront et ils disent, non merci. Aux Chinois, l’Occident propose plus de démocratie en plaidant pour le droit des peuples à choisir leurs dirigeants. A voir le résultat chez les occidentaux, dévalorisation de la Patrie, liberté de faire tout et son contraire du fait de l’individualisation absolue des sociétés dites modernes, la réponse, là aussi est Non merci.
On ne fera pas la guerre pour les frontières de l’Ukraine, pas plus pour l’émancipation de la femme dans le monde arabo-musulman. On ne fera pas la guerre pour plus de démocratie en Chine. Non, celle qui peut survenir est une guerre entre deux blocs qui sont en train de se constituer autour d’un rejet d’une modernité imposée, d’une démocratie à l’occidentale. L’Europe, menée par les Etats-Unis, a intérêt à être moins sûr de ses valeurs, à fuir la pensée unique et à respecter celle des autres. C’est cela ne pas être hégémonique.