Elles bravèrent, à coté des hommes, les matraques des sbires de Ben Ali, en Tunisie. Elles partagèrent les coups et les brutalités des policiers, à la place Tahrir, en Egypte.Elles participèrent, comme des grandes, à l’insurrection à Benghazi, en Libye. C’est encore par leur courage à défendre leurs enfants contre les sévices d’un autre âge, qu’elles donnèrent le signal de la contestation en Syrie.Elles, épouses, sœurs, mères de familles ont hurlé, avant les autres « Erhal », (Dégage). Partout, elles ont défié les dictateurs et participé, à égalité avec les hommes, à ce bouleversement qu’on a appelé « le Printemps arabe ».Les dictateurs renversés, des nouveaux acteurs politiques sortis de l’ombre, on ne peut pas s’empêcher de demander : Mais où sont passer les femmes ?
Avec l’arrivée des islamistes au pouvoir, le Printemps arabe est en train de devenir un Hivers rigoureux pour elles.En Tunisie, les extrémistes islamistes ont osé soumettre à la Constituante, un projet qui prévoyait l’introduction de la Charia dans son article 10, et un Conseil supérieur islamique, chargé des fatwas, à l’article 126.Après maintes tergiversations, Ennahda a fini par lever l’ambigüité en s’opposant à cette proposition.Bourguiba, le père de la Tunisie indépendante et moderne, doit se retourner dans sa tombe.
En Libye, c’est la charia qui est d’actualité. En Egypte, les Frères musulmans tiennent le haut du pavé. La marche vers la démocratie réelle, avec un Islam moderne et décomplexé, est bien compromise.Poursuivis par le pouvoir en place, ils se fondaient dans la grisaille de l’anonymat.Après avoir laissé, les jeunes et les moins jeunes, les femmes et les Bobos de la classe moyenne, mettre en route le mouvement populaire, ils sont revenus, sûr de leur droit, imbus de leur « Pensée unique » et veulent renvoyer les femmes derrière leurs moucharabiés.Se rendent-ils compte que c’est à une autre forme de dictature, qu’ils invitent le peuple ?
Après avoir manifesté pour les libertés, après avoir lutté pour la démocratie, force est de constater que les femmes sont les grandes absentes du nouveau chantier politique.On ne les voit plus ! Elles sont devenues inaudibles, rêvant seulement à préserver les droits acquis. On a envie de dire : Tout ça pour ça ?Vous les hommes épris de liberté et de justice, vous les hommes qui avaient, avec vos compagnes, défié les indéboulonnables, qu’avez-vous fait de vos ambitions, qu’avez-vous fait de vos rêves. On ne se couche pas devant quelques prophètes autoproclamés, fussent-ils bien organisés et surfant sur l’ignorance des démunis.
L’époque de tous les possibles ne peut pas être révolue si vite, comme submergée par une vague indomptable.De Tunis au Caire, de Tripoli à Sanaa, elles sont sorties avec vous dans la rue, pour dénoncer la dictature, l’injustice et l’absence des libertés les plus élémentaires. Ces femmes ne vous pardonneront jamais d’avoir confisquer la révolution, en les excluant de la recomposition de la société.Il faut espérer qu’elles ne se tairont pas, et qu’elles continueront à se battre. Les défenseurs des droits de la femme ne doivent pas baisser les bras.
L’extrémisme religieux, d’où qu’il vienne, ne pourra pas, longtemps, refuser aux femmes, les droits qui leur incombent et la place qu’elles méritent.Toutes les femmes, tous les défenseurs des droits de la femme, doivent accueillir la remise du prix Nobel de la paix, à la féministe Yéménite, Tawakel Karman, comme un message d’encouragement.