Avec retard et excuses, voici ma chronique politique hebdomadaire du vendredi.
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Officiellement l'intervention militaire turque dans l'enclave kurde de Syrie, est justifiée par la volonté d'y installer des réfugiés syriens. Bien peu pourtant souhaitent s'y rendre.
C'est au nom des 3,6 millions de Syriens refugiés en Turquie, tout du moins en partie, que le président turc Recep Tayyip Erdogan a lancé le 9 octobre dernier, son intervention militaire dans le nord est de la Syrie.
La crise économique et les difficultés politiques du parti au pouvoir, l'AKP du président Recep Tayyip Erdogan, qui a perdu les villes d'Istanbul et d'Ankara au printemps, n’est pas étrangère à cette aventure militaire. Les refugiés syriens, ne sont plus les "invités" des premiers jours.
En début de semaine, il a reçu le feu vert du président américain, malgré les hurlements des Démocrates et d’une grande partie des Républicains. L’opinion américaine ne comprend pas que Washington puisse abandonner leurs alliés, les Kurdes, dans la lutte contre l’hydre islamique, prétendument État islamique en Syrie.
L'objectif réel est d'occuper une bande frontalière dans cette région syrienne passée sous contrôle kurde à la faveur de la guerre contre l’EI.
Ankara veut y reloger des centaines de milliers de réfugiés syriens. En vérité Erdogan veut empêcher l'installation durable d'entités autonomes kurdes sous le contrôle des Forces démocratiques syriennes (FDS), armées et entraînées par les Etats-Unis pour combattre l'EI. Ankara redoute que l'établissement d'un "Etat kurde" dans le pays voisin ne galvanise les velléités séparatistes des Kurdes sur son propre sol.
Pour neutraliser les velléités de l’Union européenne, Erdogan n’hésite pas à recourir, au chantage : vous me laisser faire, ou j’ouvre les portes qui permettront à des millions de migrants de déferler sur l’Europe. Il n’hésite pas, ainsi, à violer l’accord conclu avec l'UE prévoyant qu'Ankara stoppe la traversée de migrants vers la mer Egée en échange d'une aide de 6 milliards d'euros.
Avantage supplémentaire aux yeux du dirigeant turc, l'installation de réfugiés en grande majorité arabes sunnites permettrait de diluer la population kurde du secteur. Une pratique récurrente dans la région.
Les réfugiés installés en Turquie ont longtemps bénéficié d'un statut favorable en comparaison à celui des autres pays de la région. Officiellement "invités" par le président turc, qui soutenait le soulèvement contre le président syrien, ils ont bénéficié d'une "carte de protection temporaire"(Kimlik).
Depuis que la spectaculaire croissance des quinze dernières années a cédé la place à la stagnation actuelle, plusieurs formations politiques turques font de la surenchère anti-réfugié. "L'opposition, d'abord, rejointe ensuite par l'AKP, quand celui-ci s'est allié aux ultranationalistes du MHP, en 2018. Le discours anti-syrien s'est propagé à tout le pays.
Il est certain que cette opération militaire turque ne risque pas d’embraser la région. Trump a déjà fait savoir qu’il n’interviendra pas en faveur des Kurdes qui « ne sont pas venus aider les soldats américains en Normandie !!! ». La Russie, si elle n’est pas un allié d’Erdogan en Syrie, et cependant un compère dans l’opération. Elle n’a aucun intérêt à contrarier les plans locaux du Président turque.
L’Union européenne est vouée à la neutralité sur place, à part des discours de commisération à l’égard des Kurdes.
La grande perdante c’est la Morale. Mais la Morale n’a jamais était une menace pour aucun gouvernement au Monde, à fortiori à un dictateur comme Erdogan.