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Gabriel Banon, Politiquement Incorrect.
1 mai 2015

Le Yémen, otage d'une guerre par procuration

Chronique politique hebdomadaire du vendredi.

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Dans quelques jours, Sa Majesté Mohamed VI, roi du Maroc, sera en visite officielle en Arabie Saoudite. Cette visite, la première depuis l’intronisation du nouveau monarque saoudien, Salmane Abdulaziz, viendra après l’annonce par Riad de la fin de la campagne aérienne au Yémen. Des avions F16 marocains ont participé à l’opération, dans le cadre d’une coalition menée par l’Arabie Saoudite. Cette coalition soutenue par les Etats Unis, fait face aux rebelles houthis appuyés par l’Iran.

 Cela fait plus de dix ans que les Houthis s’opposent au gouvernement central du Yemen. Il lui reproche sa coopération avec, à l’époque, l’administration de Georges W Bush et s’alarme de la situation socio-économique du pays. En réalité c’est le projet du découpage fédéral du pays, dans lequel les zaïdistes également appelés Houthis, s’estiment lésés, qui a mis le feu aux poudres. Sur le terrain, le recours à une rhétorique belliqueuse teintée de références religieuses a confessionnalisé le conflit.

Depuis, le Yemen s’enfonce dans une guerre qui s’est rapidement internationalisée par le désir de Rïad d’arrêter l’Iran dans sa politique expansionniste au Moyen Orient. On se trouve alors dans une véritable guerre par procuration, l’un soutenant le Yémen sunnite, l’autre aidant à l’expansion des Houthis chiites. Après plus de trois semaines de frappes aériennes menées par la coalition sunnite contre les Houthis, le Yémen s’est enfoncé un peu plus dans le chaos. L’arrêt des bombardements devrait, en principe, permettre la recherche d’une solution politique. C’est dans ce sens que le précédent Président du Yémen, Ali Abdallah Saleh a pressé ses alliés, les rebelles chiites Houthis à se retirer de la capitale, Sanaa, comme l’exige l’ONU.

Hormis la lutte d’influence entre l’Iran chiite et l’Arabie Saoudite sunnite, que représente le Yémen dans la stratégie géopolitique des puissances concernées ? Des navires iraniens, soupçonnés d’apporter des armes aux rebelles, ont été obligés de faire demi-tour, face aux navires de guerre américains dépêchés au large des cotes yéménites. C’est que la situation géographique du Yémen en fait un élément clé dans la libre circulation des pétroliers. En effet, le pays donne sur la mer rouge et sur le golfe d’Aden. Entre les deux, le détroit de Bab El-Mandel, vital pour l’approvisionnement en pétrole des Etats Unis, de l’Europe et de l’Asie. C’est entre trois à quatre millions de barils qui y transitent tous les jours.

Difficile d’admettre l’Iran, là aussi, maîtresse d’une route essentielle, comme le détroit d’Ormuz, où elle a déjà son mot à dire.  C’est naturellement que le conflit au Yémen s’est invité aux négociations USA-Iran sur le nucléaire. Dans la crise yéménite, Washington s’est rangé du côté des puissances sunnites du Golfe, en leur apportant un soutien militaire logistique ainsi que l’accès aux renseignements nécessaires. Depuis son indépendance énergétique retrouvée, l’Amérique révise ses alliances et son redéploiement géopolitique qui bascule vers l’océan pacifique.

Pour le Moyen Orient, avec un membre de l’OTAN considéré peu fiable, la Turquie, Washington se rapproche à grands pas de l’Iran. La crise au Yémen fait faire un grand écart diplomatique spectaculaire au Département d’Etat à Washington.Ecartelée entre le respect de ses engagements avec les pays du golfe, sa recherche de la conclusion d’un accord sur le nucléaire, qu’elle juge historique, et sa volonté de remettre l’Iran au milieu du jeu au Moyen Orient, l’Amérique voit son action diplomatique devenir une véritable acrobatie.

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